Les personnes qui sont finalement identifiées comme atteintes de sclérose en plaques (SEP) sont plus susceptibles de souffrir de maladies telles que la dépression, la constipation, des problèmes sexuels et des infections des voies urinaires (IVU) cinq ans avant leur diagnostic par rapport aux personnes qui ne souffrent pas de SEP, selon un nouveau étude publiée le 5 décembre dans Neurologie.
Les chercheurs ont également découvert que ces affections étaient plus susceptibles de survenir chez les personnes atteintes de lupus et de la maladie de Crohn, qui sont également des maladies auto-immunes.
Ces résultats suggèrent que les mécanismes biologiques de la sclérose en plaques peuvent déjà être déclenchés plusieurs années avant les premiers symptômes neurologiques et le diagnostic ultérieur, explique le co-auteur de l’étude. Céline Louapré, MD, PhDde la Sorbonne Université à Paris.
Étant donné que la dépression, la constipation et les autres affections identifiées ici ont également été observées chez des personnes atteintes d’autres maladies auto-immunes et sont très courantes dans la population générale, il est peu probable qu’elles puissent être utilisées pour diagnostiquer la sclérose en plaques plus tôt, explique le Dr Louapré.
« L’exception concerne peut-être les personnes qui sont particulièrement à risque de développer la SEP, en raison d’un risque familial ou parce que les patients seraient déjà suivis pour la découverte fortuite d’une maladie du SNC. [central nervous system] lésions inflammatoires sur une IRM [magnetic resonance imaging scan], » Elle ajoute.
Le prodrome de SEP peut être détectable des années avant les symptômes neurologiques ou le diagnostic
Il est de plus en plus reconnu que la SEP présente un prodrome, ou une phase précoce de différents symptômes qui signalent un risque élevé d’apparition et de diagnostic futurs de la SEP, selon une étude. revue publiée en janvier 2022 dans Frontières en neurologie. Les experts estiment qu’une phase prodromique de SEP est détectable au moins cinq ans avant l’apparition des symptômes de SEP ou 10 ans avant qu’un diagnostic de SEP ne soit posé.
De nombreux signes et symptômes ont été identifiés comme étant plus fréquents au cours des années précédant la SEP, notamment les déficits cognitifs, la dépression, la fatigue, les troubles du sommeil, la douleur, la fibromyalgie, les problèmes intestinaux et vésicaux et les affections cutanées.
Les 5 symptômes significativement associés à un futur diagnostic de SEP
Les enquêteurs ont identifié environ 20 000 personnes nouvellement diagnostiquées avec la SEP à l’aide de dossiers de santé électroniques provenant de bases de données en France et au Royaume-Uni. Ces personnes ont ensuite été comparées à environ 55 000 personnes sans SEP, appariées selon l’âge et le sexe.
Les personnes atteintes de SEP ont également été comparées à environ 30 000 personnes atteintes de la maladie de Crohn et à 7 000 personnes atteintes de lupus.
Les chercheurs ont ensuite effectué des recherches dans la base de données pour voir si les participants souffraient d’une ou plusieurs des 113 maladies et symptômes au cours des cinq années précédant et suivant leur diagnostic, ou avant cette date correspondante pour les personnes qui n’avaient pas de maladie auto-immune.
Ils ont constaté que, comparativement aux personnes sans SEP, au cours des cinq années précédant le diagnostic, les personnes atteintes de SEP étaient :
- 22 pour cent plus susceptibles de souffrir de dépression
- 50 pour cent plus susceptibles de souffrir de constipation
- 38 pour cent plus susceptibles d’avoir des infections urinaires
- 47 % plus susceptibles d’avoir des problèmes sexuels
- 21 % plus susceptibles de souffrir de cystite (infections de la vessie)
La dépression est plus probable avant et après le diagnostic de SEP
En approfondissant la dépression, les chercheurs ont découvert que 14 pour cent des personnes atteintes de SEP avaient reçu des ordonnances d’antidépresseurs cinq ans avant le diagnostic, contre 10 pour cent des personnes non atteintes de SEP. Cinq ans après le diagnostic, plus d’un tiers (37 %) des personnes atteintes de SEP avaient reçu des ordonnances d’antidépresseurs, contre 19 % des personnes non atteintes de SEP.
Pour être clair, toute personne présentant ces symptômes ne développera pas la SEP, explique Louapre.
Les auteurs reconnaissent qu’une des limites de l’étude était que les données n’étaient pas disponibles sur d’autres facteurs susceptibles d’influencer le risque de développer la SEP, tels que le niveau d’éducation, le revenu et l’origine ethnique.
Les infections urinaires, le dysfonctionnement sexuel et la constipation pourraient-ils être causés par le même processus pathologique sous-jacent que la SEP ?
Les chercheurs espèrent que l’identification de ces premiers signes continuera à faire progresser la compréhension des mécanismes biologiques qui se produisent dans le corps avant que les symptômes réels de la maladie ne se développent.
Les symptômes et les affections identifiés pourraient être causés par le même processus pathologique sous-jacent que la SEP, explique Louapre. « Ces symptômes peuvent refléter des lésions précoces du système nerveux central. Par exemple, les troubles urinaires, la constipation et les troubles sexuels pourraient être dus à la présence de lésions médullaires, qui n’auraient pas entraîné de symptômes neurologiques moteurs ou sensoriels classiques au moment de leur apparition », précise-t-elle. Les lésions de la moelle épinière (changements ou dommages anormaux) sont fréquentes dans la SEP.
« Ces lésions, même si elles sont initialement asymptomatiques, peuvent perturber certains circuits, dont les circuits neurologiques qui contrôlent les fonctions sphinctériennes », précise Louapre.
Les sphincters sont des muscles en forme d’anneau qui permettent la constriction de certains passages du corps, notamment ceux qui contrôlent la libération de l’urine, des selles et du sperme.
« De la même manière, les lésions cérébrales causées par la SEP peuvent perturber certains circuits neurologiques impliqués dans la dépression, même si les symptômes neurologiques classiques ne sont pas encore présents », explique-t-elle.